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Le Devchirmé
ottoman

Դեվշիրմե

XVI-XVII-XVIII
siècles



L’impôt
sur le sang



Devşirme . Devshirmeh . Devshirme

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  • Le Devchirmé n'est pas à confondre avec les Janissaires. Les Janissaires sont les anciens garçons ou adolescents turquifiés qui avaient été faits prisonniers lors des guerres (ou raflés lors des razzias aux frontières). Les Janissaires sont connus en Occident comme des soldats terribles et exaltés et ils font partie de sa mémoire (comme par exemple Attila). Le Devchirmé est fait dans des conditions différentes : régulièrement en temps de paix et à l'intérieur de l'Empire et non aux frontières.

  • En effet, le devchirmé était "l'impôt sur le sang" que l'Empire ottoman prélevait sur sa population chrétienne : dans les Balkans, en Anatolie, en Géorgie et en Arménie. Un fonctionnaire ottoman avec une escorte militaire allait de village en village et devait en ramener les fils ainés et les plus belles filles qui étaient ainsi arrachés à leur famille. Il y avait une certaine périodicité dans ces incursions. Les garçons ne devaient pas être trop jeunes pour pouvoir supporter le déplacement le long des routes et pas trop agés pour qu'ils puissent perdre leur culture d'origine et changer de religion. Il y a des exemples historiques connus et le personnage le plus célèbre d'origine arménienne dans ce cas-là est le grand architecte Sinan au XVIème siècle (page en préparation)

  • Les convois d'enfants et d'adolescents chétiens captifs et islamisés faisaient partie du paysage ottoman. Ils étaient dispatchés dans les villes chez les Turcs et ceci jusqu'à Istanbul. Pour les jeunes filles des villages chrétiens, elles étaient choisies parmi les plus belles et pour elles le problème d'âge ne se posait pas. Elles étaient envoyées dans les harems ou vendues comme épouses à des notables turcs jusqu'à la cour impériale à Constantinople.

  • Cette ponction régulière sur les populations régionales était structurée dans cette institution centralisée du "devchirmé"qui caractéristise l'Empire ottoman. Le sultan par des firmans auto-alimentait sa population turque par un débit d'enfants et d'adolescents qui découlait des rapts organisés et institutionalisés.

  • On peut concevoir les diverses conséquences importantes non seulement sur les populations opprimées et mutilées, mais également à l'encontre du peuple turc.
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Amputations et broyages ethniques sur 3 siècles

  • On peut imaginer la terreur qu'occasionne l'irruption inattendue ou imminente du fonctionnaire turc avec ses soldats, les drames des familles villageoises de se voir leur enfants arrachés par la force, etc, et cela pendant 3 siècles. Le trauma engendré par le devchirmé ottoman fait partie de la mémoire des peuples des Balkans, de l'Arménie et de la Géorgie.

  • Nous n'avons pas de connaissance pour pouvoir parler du traitement subissaient les nouvelles "recrues" : comment les enfants , les adolescent(e)s étaient traités? En bien ? En mal ? Peut-être en bien : pourquoi pas? Du fait même qu'ils étaient choisis pour être incorporés dans le groupe dominant et d'en faire partie... Mais ce que nous pouvons dire, même si les conditions d'accueil étaient bonnes comme l'historiographie turque voudrait le faire croire (...), il y a quand même un trauma chez tout enfant arraché à sa famille. A l'age adulte, ce nouveau turc continura à porter en lui ce traumatisme : refoulé ou non, conscient ou non, maîtrisé ou non, à fleur de peau, pouvant à tout moment s'extérioriser avec des manifestations agressives ou à l'inverse d'obséquiosité. De plus, le nouveau "turc" était amené à son tour à dénigrer, oppresser son milieu d'origine, à en arracher de nouveaux enfants.

  • Et ceci pendant des générations et des générations... et sur des centaines de milliers de cas : selon l'historien historien français du XIX° siècle, Théophile Lavallée, il y aurait eu 5 millions de personnes arrachées à leur foyer sur 3 siècles.

  • Les buts et les conséquences de ce système de peuplement mis en place étaient :

    - une augmentation de la population turque qu'on alimentait régulièrement en apportant un sang nouveau : les Turcs ottomans qui étaient rappelons-le les nouveaux arrivés dans les Balkans, en Anatolie et en Arménie

    - un enracinement (symbolique) dans la terre conquise et colonisée par le sang des autochtones

    - une diminution ou une stagnation des populations autochtones

    - un moyen d'asservissement par une terreur maintenue

    - la formation d'une classe turque besogneuse par rapport aux Turcs féodaux (d'origine nomade) qui étaient fréquemment lancés dans des guerres de conquête aux frontières.

  • A ce sujet, Karl Marx dans son introduction au Capital fait état de la structure économique de l'Empire ottoman qui était basée sur les razzias continuelles aux frontières. Engels, de son côté, de son côté parle "d'anachronisme". Voir les points de vue des marxistes sur les dominations, politiques et massacres de la part des Turco-ottomans à la fin du XIXème siècle et au début du XXème siècle.

  • Les Ottomans ne tenaient pas à islamiser en masse les populations chrétiennes. On les gardait ainsi comme on garderait un troupeau vivant. S'ils avaient été islamisés, ces avantages économiques n'auraient plus été possibles. De temps à autre, on sévissait pour montrer qu'on était le maïtre.

  • Il faut dire ici qu'en fait, il ne s'agissait pas seulement d'islamiser : en effet, les Perses ont été islamisés par les Arabes, les Albanais ont été islamisés par les Turcs. Les caractéristiques ethniques, la langue, etc, sont préservées. Là, il y a un nouveau message religieux qu'on voulait apporter : ce n'est pas le cas dans le devchirmé. En effet, la cellule familiale, les entités sociales, culturelles et religieuses sont volontairement brisées pour la turquification. Islamiser et turquifier sont certaiment deux choses différentes.

  • Aujourd'hui, là aussi, l'historiographie turque oficielle déforme la réalité présentant le Devchirmé comme "une institution religieuse islamique" : comme si on présentait la traite négrière comme une institution d'évangélisation !
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Study Sheds New Light On Ottoman Blood Tax : an Interview of Artak Shakaryan (Turkish studies scholar at Armenia’s Academy of Sciences in Yerevan) by Talin Suciyan

in Armenian Reporter and in Turkish in AGOS in end of June (Stanbul)

The Armenian Reporter
N#14 (page.3), on June 2 2007 PdF
with photo of Artak Shakaryan

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- Autres pages ADIC sur le Devchirmé -

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  • Rappel : le devchirmé est la turquification des enfants, il n'est pas l'islamisation forcée des adultes.
    - V. Torkomian, Une promenade archéologique dans les cimetières arméniens de Constantinople, Revue des Etudes Arméniennes, Paris 1924, IV, pp 215-219 (Avec 6 planches hors-texte).
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à compléter au fur et à mesure
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