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  • Le projet de la libération de l'Arménie d'Israël Ory et ses relations avec le spathaire roumain Nicolae Milescu et avec Pierre le Grand, tsar de toutes les Russies.

  • Texte tiré de l'article "Le spathaire Nicolae Milescu et son rôle dans les relations des Arméniens avec Pierre le Grand" par H. Dj. SIRUNI

  • Revue Studia & Acta Orientala, (Bucaresti), 1959,II, pp 207-216

  • [page/N° >>] indique la page de l'article dans la publication roumaine.
Recherche bibliographique : Nil Vahakn Agopoff - Iconographie : Collection Nil V. Agopoff
Correction et mise en page : Marie-Anne Le Métayer-Delbary
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    ... L'Empereur d'Autriche qui avait reçu Israel Ory à Vienne, exprima sa sympathie pour les aspirations des Arméniens, mais ne lui promit aucune aide effective. Il adressa cependant une lettre d'encouragement aux méliks et conseilla à Ory de s'adresser à la Russie car, disait-il, sans le secours de celle-ci, aucune action militaire du côté de la Caspienne n'était possible.

  • La cause arménienne s'engageait ainsi dans sa voie normale.En juillet 1701 nous retrouvons Ory en Russie. Porteur de lettres de recommandation de la part du prince électeur et de Léopold, ainsi que de la part du roi de Pologne, il venait solliciter l'assistance du peuple russe. Il arrivait cependant à un moment où Pierre le Grand avait des préoccupations plus immédiates : la guerre contre la Suède.

  • Néanmoins, Ory fut reçu à Moscou avec les égards dus à un envoyé de l'électeur du Palatinat, et une demeure spéciale lui fut réservée. Il était accompagné de l'archimandrite Minas et d'un Arménien de Pologne, Nazar Orekhovitch, qui lui servait d'interprète. Les frais de leur séjour étaient à la charge de l'Etat russe (*1).

  • Le tsar ne reçut pas Ory immédiatement. C'est le chancelier Golovine qui fut chargé de prendre contact avec lui. Aux questions qui lui furent posées, Ory ne répondit que par écrit. Dans une déclaration écrite datant du 14 juillet 1701, il fit appel aux sentiments chrétiens du tsar lui demandant de libérer les peuples subjugués d'entre les griffes des infidèles (*2). Ory s'engageait ainsi dans sa nouvelle voie ; il liait les aspirations de son peuple à celles du peuple russe.

  • Cinq questions furent alors posées à Ory (*3). Le gouvernement russe voulait savoir combien de soldats le prince électeur et les autres princes allemands étaient décidés à mettre à la disposition du représentant des Arméniens; par quelle voie et sous quel prétexte ces troupes traverseraient la Russie et qui les ravitaillerait; quelles garanties seraient données que dans leur traversée [page/211 >>] ces troupes ne causeraient pas de préjudices aux habitants; sous l'égide de qui seraient mises les localités qu'on occuperait et quelles forces y seraient maintenues; enfin, comment ces troupes prendraient leurs quartiers d'hiver et comment elles seraient ravitaillées après la fin de l'expédition.
  • Dans sa réponse, (*4) Ory laissait entendre que l'expédition se composerait de forces russes; que la participation du prince électeur et de l'empereur serait plutôt symbolique et qu’elle n'aurait lieu que dans la mesure où la Russie le permettrait; que dans ce cas, les troupes de ces derniers paieraient au comptant tout ce dont elles auraient besoin pendant leur traversée; qu'elles feraient cette traversée au nom du tsar russe; que toutes les garanties seraient données pour le maintien de l'ordre; que les localités occupées passeraient sous la juridiction russe et seraient mises sous la garde des troupes russes; qu'après la fin de l'expédition, les troupes prendraient leurs quartiers d'hiver en Arménie et seraient entretenues par les Arméniens.

Pierre le Grand
  • Ory assurait en même temps que dans le cas où 10 à 20.000 soldats russes pénétreraient à la fois en Arménie, les forces armées des Arméniens se joindraient à eux et que, dans les dix jours, 100.000 Arméniens au moins se trouveraient sous les ordres des autorités militaires russes.L'exposé d'Ory intéressa effectivement les milieux gouvernants russes. Plusieurs séances furent alors tenues en vue d'une étude plus détaillée de la situation.

  • Certains historiens arméniens soutiennent qu'Israël Ory avait voulu que ces conversations fussent tenues secrètes. Il se méfiait même de son interprète, Nazar Orekhovitch, qu'il trouvait trop jeune pour participer à des conférences officielles de cette importance (*5).Par ordre du tsar, délégation fut alors donnée au spathaire Nicolae Milescu, qui avait toute la confiance de la cour et était en même temps un bon connaisseur de la langue turque.

  • Plusieurs séances eurent lieu, auxquelles participèrent Israël Ory, Nicolae Milescu et un secrétaire désigné par le département des ambassadeurs, Maxime Alexéev. On ne s'y borna pas à traduire et à enregistrer les propositions et les déclarations de la délégation arménienne, on y débattit également des questions d'ordre politique.Ainsi, dès le début, ces séances prirent le caractère de conférences politiques.Les procès-verbaux de ces séances constituent en effet les premiers documents de l'activité diplomatique des représentants arméniens.

  • La première entrevue (*6) eut lieu le 23 juillet 1701 sur l'initiative du département d'Etat des ambassadeurs, lequel délégua l'interprète Nicolae Milescu et le secrétaire Maxime Alexéev pour prendre contact avec Israël Ory. Cette entrevue fut un des événements décisifs de l'histoire arménienne, car elle marque le début de l'orientation qu'allait adopter le peuple arménien. En effet, dans son exposé, Ory fit entendre nettement que la collaboration des autres pays européens ne serait que symbolique et que tous les espoirs des Arméniens étaient tournés vers la Russie.
  • Le buste du spathaire
    Nicolae Milescu à Bucarest


  • Nicolas Milescu (1636-1708) ,
    c'est le "Marco Polo roumain"
    qui est allé jusqu'en Mongolie.

  • Biographie en français : Emile PICOT, -- Notice biographique et bibliographique sur Nicolas Spatar Milescu. – Paris : 1883. – p. 44.
  • Deux jours plus tard, le 25 juillet 1701, Israël Ory dicta à Milescu un rapport détaillé, en présence du secrétaire Maxime Alexéev. Le procès-verbal [page/212 >>] de cette séance précise qu'Israël Ory traduisit verbalement, en turc, le texte français de son long rapport et qu'à son tour Milescu le traduisit en langue slavonne.Ce rapport, qui diffère très peu de celui présenté par Ory à l'électeur palatin, contient le projet détaillé d'une expédition en Perse, avec indication des conditions et des moyens propres à la faire réussir. (*7)

  • Dans ce nouveau projet il n'est plus question d'une armée composée d'Autrichiens, de Bavarois et de Toscans. Il prévoit uniquement la constitution d'un corps de troupes formé de 25.000 Cosaques, dont 10.000 devaient se diriger à travers la mer Caspienne vers Shamakhi et les 15.000 autres devaient pénétrer en Géorgie par le défilé de Darial. Ainsi, la Géorgie était, elle aussi, incluse dans la zone d'action. L'expédition devait se terminer par l'occupation de Tabriz. Ory ajoutait que toutes ces opérations ne devaient durer que quelques semaines, étant donné que les Persans ne disposaient pas de forces à ce moment-là, ce qui était parfaitement vrai.

  • Le 1er août 1701 Israël Ory, par une adresse à Golovine, écrite en latin et traduite par Milescu, demandait une audience au tsar. (*8)Ce n'est que fin octobre que Pierre le Grand reçut Ory. Le délégué arménien se présenta comme ambassadeur du prince électeur et offrit au tsar les cadeaux qu'il avait apportés. (*9) L'accueil fut très amical.
 

  • Le 18 novembre Israël Ory était invité au département des ambassadeurs. Auprès du chancelier Golovine se trouvait sans doute aussi Milescu. On communiqua au délégué arménien la réponse de l'empereur. Elle n'était pas encourageante. Le tsar déclarait qu'il était incliné à accorder l'aide qu'on lui demandait, mais que la guerre avec la Suède ne lui permettait pas de prendre à lui seul la responsabilité de l'expédition. Il conseillait donc que le prince électeur prit lui-même l'initiative, en envoyant 3 ou 4 régiments, qui passeraient à travers le territoire russe et auxquels les autorités donneraient tout l'appui nécessaire.

  • Le tsar n'abandonna cependant pas la question. Afin de connaître la situation exacte, et peut-être aussi pour vérifier les indications d'Ory, il décida d'envoyer en Perse un homme adroit, qui devait s'y présenter comme simple commerçant. En effet, les renseignements apportés par Vassili Koutchoukov qui avait été envoyé antérieurement en Perse ne correspondaient pas à ceux présentés par Ory. Celui-ci demanda alors d'accompagner le nouveau délégué dans son voyage.

  • Par ordre du tsar, le 24 novembre 1701 Nicolae Milescu et le secrétaire Lavrentie Protopov rencontrèrent de nouveau Israël Ory. Au cours de cette entrevue, où. fut discutée par le détail l'organisation d'une éventuelle campagne en Perse, Israël Ory proposa l'envoi, par le tsar, d'une lettre aux méliks d'Arménie, ainsi que d'un message d'encouragement au peuple arménien; il demandait en outre d'être chargé lui-même d'une mission en Perse. (*10)

  • De nouveau, tout dépendait de Jean Guillaume.Mais la guerre de la succession d'Espagne qui venait d'éclater réclama la participation du prince électeur. Une expédition en Orient devenait dès lors impossible.

  • [page/213 >>] De son côté la Russie se trouvait aux prises avec ta Suède. En décembre, les armées russes avaient remporté leur première victoire et se préparaient pour une action plus vaste. Ory attendit donc, indécis. Finalement, par une lettre datée du 25 février 1702, il demanda d'être envoyé en Perse ou bien enrôlé dans l'armée russe. (*11)

  • Le 11 mars 1702 Nicolae Milescu, sur ordre du département des ambassadeurs, se rendit auprès d'Israël Ory et de Minas Vardapet et leur fit savoir de la part du tsar qu'aussitôt la guerre avec la Suède terminée victorieusement, celui-ci s'occuperait des questions pour lesquelles Ory avait été envoyé, et que le délégué arménien pouvait d'ores et déjà faire part de cette communication à ceux qui l'avaient mandaté. (*12)

  • Cette nouvelle réjouissante, Ory et Minas la transmirent aussitôt à Jean Guillaume, par l'entremise de Nazar Orekhovitch, et aux méliks d'Arménie, par l'entremise de Miron Vassilev, un Arménien de Moscou, capitaine dans l'armée russe.

  • Le département d'Etat des ambassadeurs conservait deux lettres en langue arménienne. (*13) La première, écrite le 7 novembre 1702 par le remplaçant du Catholicos d'Etchmiadzin, Minas Vardapet, et adressée à Ory, lui souhaitait de mener à bonne fin la mission qu'il avait assumée. L'autre,.datée du 7 décembre, était une lettre de bénédiction écrite par Esayi à l'occasion de son installation comme Catholicos de Gantzasar.A la fin du résumé russe de ces lettres, une note précise que le département des ambassadeurs n'ayant pas de traducteur pour la langue arménienne, le contenu de ces messages a été exposé par Israël Ory et Minas Vardapet en langue turque, à l'interprète, le spathaire Nicolae, lequel l'a traduit ensuite en langue slavonne.

  • Jean Guillaume, satisfait, lui aussi, adressa par l'entremise d'Ory une lettre (*14) au tsar pour le remercier du bienveillant accueil qu'il avait fait à Ory et à sa mission. A son tour il déclarait qu'aussitôt la guerre d'Espagne terminée victorieusement, il ne manquerait pas de donner les secours promis.Ory se voyait trompé une fois de plus dans ses espérances, car la lettre.du prince électeur signifiait pour l'envoyé arménien un nouveau retard dans l'accomplissement de la tâche qu'il avait assumée. Ainsi, aucun espoir pour l'avenir prochain de la part de ses protecteurs de l'Europe occidentale. D'autre part, Pierre le Grand, de qui dépendait alors en premier lieu la solution des questions concernant l'Orient, se trouvait en pleine guerre, lui aussi, et occupé en même temps à édifier, sous le feu de l'ennemi, sa nouvelle capitale.

  • Ory ne pouvait plus attendre dans le désœuvrement l'arrivée du jour heureux qu'il attendait. Il préféra se mettre au travail et commencer les préparatifs : se rendre d'abord en Occident en vue de s'assurer la collaboration de spécialistes pour les jours décisifs qui viendraient; ensuite en Perse pour une mission diplomatique et, par la même occasion, pour prendre contact avec les siens.[page/214 >>] Le gouvernement russe lui donna son consentement. Le 3 décembre 1703 Pierre lui conféra le grade de colonel (*15) et lui remit des lettres pour le prince électeur (*16) ainsi que pour l'empereur Léopold (*17), leur mandant qu'Ory leur exposerait la situation et leur ferait connaître les intentions du tsar.
 

Reconstitution historique par les peintres Gourguèn Ghougazian & Grigor Azizian

Paru dans Sovétakan Hayasdan, Erévan 1978 - II.

de gauche à droite : Pierre le Grand, un secrétaire, certainement Golovine, Minas Vardapet et Israël Ory


Меликсет-Бек, Л. М. К биографии сподвижника Исраэля Ори-Минаса вардапета (Предсмертные дны и опись оставшегося после Минаса имущества). ՀՍՍՌ ԳԱ Տեղեկագիր հասարակական գիտությունների, 1946
-I . pp. 76-88.

 
 
  • Laissant l'archimandrite Minas à Moscou, Ory part le 10 février 1704 et se rend d'abord à Düsseldorf, où l'attendait sa famille (*18).Mais le séjour d'Ory en Occident dura trop longtemps. La guerre de la succession d'Espagne avait pris une tournure satisfaisante pour l'empereur Léopold, lequel concentrait maintenant tous ses efforts en vue du coup final.Il ne pouvait donc être d'aucun secours pour l'envoyé arménien. Le pape crut qu'une mission diplomatique d'Ory en Iran pourrait servir les intentions de l'envoyé arménien. L'électeur palatin, qui se trouvait à ce moment-là à Vienne, soutint Ory dans toutes ses démarches, mais tout son appui se réduisit à une lettre adressé au shah de Perse, en date du 2 avril 1705, le priant de traiter les chrétiens avec plus de mansuétude. (*19) Une lettre analogue fut signée par le pape...

  • Ory fit un séjour aussi à Amsterdam. (*20) II y acheta des armes pour le détachement arménien qu'il avait l'intention d'organiser à Astrakhan, dans le cadre de l'expédition russe.En 1705 il était sur le point de retourner à Moscou, lorsque intervint la mort de l'empereur Léopold. Ory attendit encore, afin d'être reçu en audience par le nouvel empereur, Joseph Ier, et de s'assurer la bienveillance de celui-ci en faveur de la cause du peuple arménien.Il ne fut de retour à Moscou qu'en octobre 1706.

  • Dans les documents concernant les relations de Pierre le Grand avec le peuple arménien, le nom du spathaire Nicolae Milescu est mentionné aussi.à l'occasion du départ d'Israël Ory pour la Perse en qualité d'ambassadeur du tsar.Cette mission fut confiée à Ory par le tsar en avril 1707.Parmi les dépositions faites en mai 1707 au département des ambassadeurs par les quelques étrangers qui devaient faire partie de la suite de l'ambassadeur Israël Ory, figure aussi celle d'un certain André Haritonov originaire de Hongrie, qui avait été engagé par Ory. Dans cette déposition, Haritonov, parlant du voyage en Perse auquel il devait participer comme membre de la suite d'Ory, mentionne que « le spathaire Nicolae, interprète auprès du département des ambassadeurs, avait connaissance de ce voyage » (*21), ce qui prouve qu'à cette date Milescu continuait à détenir le poste d'interprète, bien qu'âgé de 80 ans.

  • Les deux délégués arméniens tenaient au courant les milieux dirigeants d'Arménie de leurs conversations avec les hautes autorités russes. Dans leurs [page/215 >>] comptes rendus, Israël Ory et Minas Vardapet ne manquaient pas de mentionner l'appui qu'ils trouvaient auprès du chancelier russe ainsi qu'auprès de l'interprète du tsar.Au printemps de 1703 les méliks réunis à Gantzasar, après avoir pris connaissance des rapports reçus de Moscou sur la marche des pourparlers russo-arméniens, rédigèrent une adresse au tsar, lui exprimant toute leur joie pour la sollicitude qu'il témoignait à la nation arménienne, l'assurant de leur dévouement sans bornes et déclarant une fois de plus qu'ils mettaient tout leur espoir dans le souverain russe pour la libération de leur pays du joug séculaire. En même temps, ils renouvelaient leur entière confiance dans leurs délégués, Israël Ory et l'archimandrite Minas (*22).
  • Les représentants du peuple arménien ne pouvaient non plus rester indifférents à l'égard des autres personnes qui s'intéressaient au sort de leur malheureuse patrie.Et en effet, dans la même séance, les méliks, prenant acte des services rendus à la cause arménienne par les deux hommes d'état de Moscou, Golovine et Milescu, leur adressèrent des lettres de remerciement. Ils rappelaient le message qu'ils avaient reçu à ce sujet de la part d'Israël Ory et de Minas Vardapet qui louaient la bonté et l'affection que les deux dignitaires témoignaient aux envoyés du peuple arménien, ainsi que l'intérêt qu'ils prenaient à la cause arménienne.En même temps, en signe de leur gratitude, les méliks décidèrent, sur la proposition de leurs délégués à Moscou, d'envoyer une somme à chacun des deux dignitaires, soit 20.000 ducats au chancelier Golovine et 4.000 ducats à Nicolae Milescu. Ils ajoutaient que, vu le danger qu'il y avait à envoyer ces dons en espèces, ils joignaient à leurs adresses deux lettres d'engagement par lesquelles ils se déclaraient obligés de payer les susdites sommes à la première occasion favorable.

  • Les originaux en langue arménienne de l'adresse de remerciement et de la lettre d'engagement envoyées par les méliks au spathaire Nicolae Milescu n'ont pas été conservés. Nous possédons par contre, la traduction russe de la lettre d'engagement datée du 27 mai 1703 (*23) et portant les noms des huit signataires : Tadeos, Pilibos, Shahnazar, Sukias, Amir, Melcon, Agagean et Hannes.Notons également que bien plus tard, en mars 1736, Minas Vardapet, collaborateur et successeur d'Israël Ory, commence ainsi son rapport au général S.A. Saltykov : « En l'an 1701, je me suis rendu à Moscou en compagnie de mon ami Israël Ory, et là ont été discutées des questions secrètes avec le boïarine Feodor Alexéevitch Golovine et son interprète, le spathaire Nicolae, concernant les intérêts russes, questions auxquelles le roi (de Géorgie) Arcil a donne son consentement et que Sa Majesté feu l'empereur Pierre Ier a bien voulu accepter » (*24)

  • Milescu a donc joué un rôle actif dans ces premiers contacts entre les envoyés arméniens et les autorités russes et il a sa part dans le resserrement [page/216 >>] des liens d'amitié entre le peuple arménien et le grand peuple russe. Il a ainsi contribué au mouvement de libération du peuple arménien.Fils d'un peuple qui supportait lui aussi le joug de l'étranger, Nicolae Milescu comprenait mieux que personne les souffrances de la nation arménienne et ses efforts pour y mettre fin.

  • Nous avons vu que la collaboration de Milescu ne s'est pas limitée à celle d'un simple traducteur. Le rôle du spathaire a été très important dans les pourparlers qui eurent lieu entre la délégation arménienne et les gouvernants russes.Cette collaboration entre Nicolae Milescu et l'enthousiaste représentant des Arméniens constitue une page particulièrement importante de l'histoire du mouvement de libération du peuple arménien. C'est un moment décisif de cette histoire que celui où deux hommes, dont l'un déjà vieux et plein d'expérience, l'autre encore jeune mais déjà bien éprouvé, s'approchent l'un de l'autre et laissent parler leurs cœurs.L'un pense que seule « la main puissante du souverain russe libérera la Moldavie et les peuples balkaniques de la tyranie turque », ainsi qu'il ressort nettement de la dédicace qu'il adresse à Pierre le Grand en lui offrant l'un de ses ouvrages. (*25) L'autre, que l'Occident a déçu, est déjà arrivé à la conviction que le peuple arménien ne pouvait trouver d'appui que dans la Russie.

  • Ainsi, dans l'histoire du mouvement d'émancipation du peuple arménien, le nom de Milescu figure comme celui d'un ami sincère et éprouvé de la cause arménienne, à un moment où les représentants de ce peuple procédaient aux premiers tâtonnements en vue de la réalisation de leurs aspirations nationales.Si les Arméniens de son temps n'ont pu lui témoigner leur gratitude, ceux d'aujourd'hui ont le devoir, d'honorer sa mémoire. Je suis heureux de l'occasion qui m'a été offerte d'évoquer dans ces quelques brèves notes la figure de cet ami des Arméniens.

  • Bibliographie utilisée par H. Dj. SIRUNI
    - A : Ezov, Les relations des Arméniens avec Pierre le Grand,
    - B : Léo, Histoire des Arméniens, Tome III,

    - C : You. Arséniev, « Novié dannié o slouchbé Nikolaya Slataria ve Rossii », Moskva, 1900,
    - D : Histoire de la Moldavie, Kishinev, 1951,
  (*1) A, p. 73
(*2) A, p. 74
(*3) A, p. 72
(*4) A, p. 40
(*5) B, p. 561
(*6) B, pp. 83-85
(*7) A, pp. 85-95
(*8) A, p. 96
(*9) A, p. 99
(*10) A, p. 102
(*11) A, p. 108
(*12 ) A, p. 111
(*13) A, pp. 137-140
(*14) A, p. 134
(*15) A, p. 186
(*16) A, ,pp. 197-199
(*17) A, pp. 194-190
(*18) A, ,p. 203
(*19) A, p. 21Q_
(*20) A, p. 211
(*21)A, p. 239
(*22) A, pp. 151—157
(*23) C, ctr. 57
(*24) A, p. 435
(*25) D, p.251

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Une partie de la carte d'Israel Ory : on peut y voir la Perse au sud de la Mer Caspienne