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  • Les rues arméniennes de Bucarest

  • Krounk, VII 1988, pp 18-20 (Erévan)


  • Recherche biblio / icono-graphique :
    Nil V. Agopoff

  • Document numérisé et mise en page par Méliné Papazian
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Le Khan Manouk
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  • Bucarest possède de nombreuses rues à appellation arménienne. La plus ancienne est la rue Armeneasca qui coupe l'artère principale de la capitale, le boulevard Republicii. A la croisée de ces artères, on trouve une église arménienne construite dans le style de la cathédrale d'Etchmiadzine, une école arménienne, la rédaction du journal arménien "Nor Kiank" ainsi que la Maison de la culture arménienne avec sa bibliothèque et son musée. Dans la cour de cette église s'élève le buste du général Andranik dû a Hovakim Torossian, sculpteur arménien de Roumanie.

  • A Bucarest les commerçants arméniens s'étaient établis autour d'une église appelée Baratia. Ce quartier devait s'appeler, plus tard, Cartierul armenesc (quartier arménien) .

  • Il y a quatre rues à Bucarest, qui portent le nom d'Arges. Selon l'académicien Hasdeu, éminent historien roumain, la ville roumaine d'Arges près de Bucarest, aurait été fondée par des Arméniens émigrés de la ville d'Ardjech près du lac de Van, dans l'Arménie historique. Au XIIIe siècle, les immigrés arméniens en Roumanie auraient donné le nom d'Ardjech à la ville, ainsi qu'à la rivière voisine.

  • La rue Ion (Ohan) cel Viteaz (Jean le Brave) est nommée à la mémoire de l'illustre général arménien du XIVe siècle, Ion le Brave ou Ion l'Arménien. Entre 1572 et 1574, cette personnalité politique et militaire a été prince de Moldavie. Il a dirigé la lutte de libération nationale du peuple moldave contre la Turquie des sultans, il a fait battre monnaie à son effigie et grâce à sa politique sage et prévoyante, il a été surnommé "Brave de Moldavie".

  • Une autre rue de Bucarest porte le nom du médecin Buicliu (Béyeklian Khatchérès Stépan), considéré, selon
    la dernière édition de l'Encyclopédie roumaine, comme un des fondateurs de la médecine roumaine. Né en décembre 1867 dans la ville de Roman (Moldavie), un des foyers arméniens les plus anciens et les plus importants, il est mort en 1916, à Bucarest.

  • Plusieurs rues de la capitale et d'autres villes roumaines sont appelées d'après le nom de Ghoerghe Asachi, pédagogue, écrivain, publiciste, peintre, traducteur d'origine arménienne, qui est le fils de Lazar Asachievici, personnalité religieuse, écrivain et traducteur, dont l'origine arménienne est attestée par des documents
    conservés aux Archives nationales de Cernautsi.

  • Né en 1788, dans la localité de Herta de la province de Bucovina, Asachi, qui connaissait plusieurs langues étrangères, a fait ses études à Lvov, à Vienne et à Rome. Dans cette dernière ville il a étudié l'astronomie, les mathématiques, les arts plastiques, les lettres. Ses oeuvres ont joué un rôle important dans le développement
    de la littérature roumaine. On lui doit la fondation de la première école où l'enseignement était fait en langue nationale, ainsi que celle de l'école technique de Iasi ; les premiers spectacles en roumain ont été présentés à
    son initiative. En 1836 il a inauguré le Conservatoire de musique et d'art dramatique. Il a fondé également
    l'Académie Mihaileanu, la typographie "Albina" (l'Abeille), et fait paraître maints journaux et revues scientifiques. On lui doit une encyclopédie bilingue français - roumain.

  • Plusieurs villes roumaines possèdent les bustes et monuments de personnalités arméniennes.Dévoué aux intérêts de la colonie arménienne, à la pérennité de la nation arménienne, Asachi a ouvert plusieurs écoles arméniennes. Dans les organes de presse qu'il dirigeait, il a fait paraître bon nombre d'articles sur l'Arménie, ainsi que des extraits d'oeuvres littéraires arméniennes. C'est à lui que la colonie arménienne de Roumanie doit la première imprimerie arménienne ouverte à Jasi où, dans les années l847-l853 des manuels arméniens et d'autres ouvrages furent publiés.

  • Une des rues de Bucarest porte le nom du glorieux général arménien Mihai (Mikaël) Cerchez. Promu
    lieutenant en l858. Mihai Cerchez, grâce à son talent militaire, est nom-mé commandant adjoint de la garnison
    de Bucarest. À l'âge de trente ans, il est déjà colonel. En l875 il visite la Russie, où le tsar Alexandre Il lui
    remet l'ordre d'Anna de IIe clas-se. Durant la guerre pour l'indépen-dance de la Roumanie de 1877-1878,
    le talent militaire de Cerchez se manifeste dans toute sa force. Il libère Plevna, fait huit mille prisonniers turcs
    et capture le commandant Osman pacha. Cette brillante opération militaire vaut à Cerchez le grade de général. Après l'armistice, il est nommé commandant de la forteresse de Vidin. En 1878 Cerchez est élu membre du conseil militaire de l'armée. Il meurt à l'âge de quarante-six ans. Ses bustes sont conservés dans les musées militaires de Bucarest et de Plevna.

  • Au centre de la capitale, il y a une rue qui porte le nom de Vasile Conta, un des fondateurs de l'école
    philosophique de Roumanie. Le journal du Collège académique de Iasi atteste que son père était un prêtre arménien. Vasile Conta est né en 1845, dans la région de Neamt, en Moldavie. Il a fait ses études à Iasi. Dès ses années scolaires il a montré un fort penchant pour la philosophie. Il a poursuivi ses études à la faculté de droit de l'Université de Iasi. Il connaissait plusieurs langues européennes. En 1872 il reçoit le titre de docteur en droit à l'Université de Bruxelles. De retour en Roumanie, il dirige la chaire de droit civil de l'Université de Iasi. Il a entretenu une correspondance suivie avec Charles Darwin, Friedrich Buchner, Ernst Hegel et d'autres personnalités éminentes. Dans ses articles, Conta a souvent parlé des Arméniens et de l'Arménie.

  • Une des rues bien connues de Bucarest porte le nom de Spiru Haret, mathématicien, sociologue, homme
    politique d'origine arménienne. Il a été élu membre de l'académie des sciences de Roumanie. La Commission internationale des appellations spéciales donna le nom de Haret à l'un des cratères de la Lune.

  • Une autre rue de la capitale roumaine porte le nom de Dumitru Bagdasar, éminent médecin d'origine arménienne. Dumitru Bagdasar est né en 1898. Après avoir terminé la faculté de médecine de l'Université de Bucarest, il poursuit ses études à Boston (USA). Bagdasar était une des figures no-toires du mouvement antifasciste. En 1945, après l'instauration du régime démocratique en Roumanie, il devint ministre de la Santé du premier gouvernement démocratique, poste qu'il détint jusqu'à sa mort précoce, survenue dans la même année. Pour les services rendus à la science médicale de Roumanie, le professeur arménien fut élu, à titre posthume, membre de l'Académie des sciences de la République socialiste de Roumanie, et son nom fut donné à l'Institut de médecine et de pharmacologie.

  • Nicolae Bagdasar, le frère cadet de Dumitru, était un philosophe roumain de renom, auteur de nombreux
    ouvrages scientifiques.

  • Une autre rue bien connue est la rue du Musée Zambaccian (ex-villa Zambaccian) qui porte le nom du grand critique et collectionneur d'oeuvres d'art Grigor Zambaccian. Fin connaisseur, Zambaccian s'est consacré,
    pendant prés d'un demi-siècle, à la collection d'oeuvres d'art et à leur étude. Il a créé, ainsi, une riche collection particulière conservée au Musée Zambaccian où, à part les oeuvres de peintres roumains, on peut voir des
    toiles de Carot, de Bonnard, de Picasso, d'Utrillo et d'autres. Parmi les monographies dues à sa plume
    mentionnons "Les Peintres français contemporains" et les "Pages d'art". En 1948, Zambaccian fut élu membre correspondant de l'Académie roumaine, et en 1957 il reçut l'ordre du travail de 1ère classe. Dans les dernières années de sa vie, Grigor Zambaccian offrit à l'Arménie des toiles de peintres français et flamands des XVI-XIXe ss., d'une grande valeur.

  • Grâce à ces dons, le nom de Zambaccian reste à jamais rattaché à l'histoire de la Galerie de peinture nationale d'Arménie. Parmi les études arménologues de Zambaccian mentionnons "L'Art de la tapisserie arménienne", "L'Esprit de l'architecture arménienne", "L'Architecture arménienne et l'Occident", "Le Voyage de Leonard de Vinci en Arménie".

  • Dans les aunées cinquante de notre siècle, une des rues de Bucarest fut rebaptisée et prit le nom de l'ardent révolutionnaire arménien Souren Spandarian.

  • Certaines rues de Bucarest portent le nom d'éminents arménologues roumains. Citons Bogdan Hasdeu,
    historien, linguiste, ainsi que le grand arméniste Nicolae Iorga, fondateur des études arméniennes en Roumanie, dont le peuple arménien se souviendra toujours avec reconnaissance.